Près de six mois après son avènement au pouvoir, le président Michel Martelly affronte sa première grande crise politico-institutionnelle avec les suites tumultueuses de l'arrestation du député Arnel Bélizaire.
Si personne dans l'entourage du président ne s'est porté responsable (aucune démission n'a été offerte) de l'escalade ou n'a encore payé le prix fort pour cette sortie de route - l'arrestation suivie de conduite au pénitencier national d'un élu en exercice - il est évident que cette affaire a mis à mal la cohésion du gouvernement et ébranlé la popularité fragile du président.
Popularité fragile car ce n'est qu'avec un petit nombre de voix - moins du sixième de l'électorat- que Martelly a remporté des élections controversées pour accéder au pouvoir.
Cela dit, ce n'est pas tant les rapports de force qui s'inversent, qui inquiète - le Parlement est avec le gouvernement (le sénateur Lambert, clair et tranchant, l'a réaffirmé samedi) - mais la confiance dans la bonne santé de la démocratie haïtienne. La confiance dans les qualités de démocrates et d'hommes d'Etat des hommes qui sont à la tête du pays a pris un coup dans cette affaire Bélizaire.
Pour ne rien arranger, parlementaires et ministres, commissaire ou policiers se tirent dans les pattes. L'on décide, après on recule. On se fait une certitude, ensuite, on crée une commission d'enquête. On laisse arrêter un parlementaire, puis on s'en lave les mains. Tous les responsables s'emmêlent les pinceaux. Chacun cherche une planche de salut. Qui sur un fragile mensonge, qui sur une vérité improbable.
Le gouvernement Conille va-t-il trouver son fil d'Ariane, empêtré qu'il est dans cette crise à rebondissements ? Martelly va-t-il pouvoir conduire ses grands projets si, sur la première peccadille, le gouvernement perd son self-control et passe en force, faisant fi de l'immunité d'un parlementaire?
On comprend bien qu'il faille remettre à un autre jour la remobilisation de l'armée. Que la CIRH ne peut pas revenir sur le tapis pour le moment. Impossible de faire venir en force des investisseurs dans un pays qui renoue avec l'autoritarisme. Comment discuter budget avec des parlementaires qui voient rouge ?
L'affaire Bélizaire ne se comptabilisera pas seulement en jours ou semaines perdus. Le prix sera plus lourd si vite on ne change pas de logiciel dans la conduite des affaires du pays.
Vivement la nouvelle version du logiciel, le Martelly 2.0.
Frantz Duval
duval@lenouvelliste.com
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