Les personnalités de l’année 2011

Le Nouvelliste publie pour la première fois sa liste des douzes personnalités de l'année. Il y a dans notre liste, faite par le journal, ceux qui, d'ici ou d'ailleurs, ont pesé sur notre vie de peuple pendant l'année écoulée. Une façon simple de leur rendre hommage ou de jeter un éclairage sur leur action

Arnel Bélizaire

Le député de Delmas-Tabarre n'était pas un illustre inconnu avant que le président Michel Martelly le désigne à la vindicte de sa justice. Militant, prisonnier ou politique, il était à l'avant-scène avant que Martelly en fasse la figure emblématique du Parlement. Tous ceux qui craignent la résurgence d'un pouvoir fort se sont réjouis de sa sortie victorieuse de prison.
A cause de lui, le ministre de la Justice de Martelly renoncera à son job pour avoir encouragé l'arrestation de Bélizaire. Il en sera de même du commissaire du gouvernement. Le ministre de l'Intérieur et chef de cabinet du président de la République négocie encore pour ne pas subir dans les jours qui viennent le courroux des députés qui le soupçonnent d'être impliqué dans l'arrestation du député Bélizaire.
Avec l'affaire Bélizaire, Martelly s'est brûlé les doigts en essayant de passer outre le droit.

Bicha

Il n'est plus Tonton Bicha depuis qu'il ne vieillit plus. Bicha, cela suffit. C'est même une marque. Un label. Une garantie que votre publicité sera vue, mémorisée, reprise, apprise.
Bicha a fait du plus luxueux magasin d'Haïti une destination pour le commun des Haïtiens. Il popularise le réflexe des assurances vie et décès. L'acteur-chanteur vend aussi bien le riz que les forfaits téléphoniques, la peinture ou les précautions à prendre pour éviter de mourir du choléra.
Et dans tous les spots il est parfait. Parfait depuis qu'un clip de Brother's Posse l'a fait connaître comme le père acariâtre d'une jeune fille du nom d'Anne. Sur la même histoire, il sera la vedette du plus gros succès du cinéma haïtien avec « I Love you Anne ».
Ah ce Bicha on le voit partout, sauf sur grand écran...

F. Carl Braun

Avec l'inauguration de la minoterie de Les Moulins d'Haïti, un groupe d'investisseurs, nationaux et internationaux, ont réaffirmé leur foi dans le pays. Moins de deux après le séisme qui avait détruit l'usine de Laffiteau, au lieu d'empocher la prime versée par les compagnies d'assurances, c'est la minoterie la plus moderne de la Caraïbe qui est sortie de terre et qui va moudre du blé et dorénavant du maïs pour satisfaire le marché local.
Grand payeur de taxes et de dividendes, employeurs et partenaires en affaires de milliers de distributeurs et de revendeurs, Les Moulins d'Haïti reviennent dans le paysage.

Hillary Clinton

L'ex-première dame des Etats-Unis d'Amérique devenue secrétaire d'Etat est en pays connu quand on parle d'Haïti. Elle était assez proche de son mari, lui-même totalement impliqué dans le dossier haïtien, pour connaître les tenants et les aboutissants des leaders qui sont sur le terrain et les enjeux.
C'est fort de ses connaissances et de toute la puissance du grand ami d'Haïti que sont les Etats-Unis que madame Clinton a pesé de tout son poids pour faire avancer la machine électorale bloquée après le premier tour.
En pleine crise égyptienne, la secrétaire d'Etat a fait un voyage éclair en Haïti qui a débouché sur des résultats inattendus qui ont conduit à l'élection de Michel Martelly.

Joseph Lambert

Le sénateur Lambert a joué tous les rôles au Parlement haïtien ces deux dernières décennies avant d'en être le leader et de se poser en sage, en dernier recours. Aujourd'hui, faiseur de roi et patron de la plateforme Inite, l'ancien Espwa, Joseph Lambert, l'homme du Sud-Est a un rayonnement sur tout le pays. Si on ignore parfois quels intérêts le motive, le sénateur arrive toujours à prendre parti pour le camp de la victoire depuis l'élection de Martelly. Ce dernier confesse que son pire ennemi est devenu son meilleur allié. Sacré Lambert !

Michel Joseph Martelly

Personne ne s'imaginait que le président auto-proclamé de la musique compas serait un jour celui qui recevrait les honneurs comme président de la République. Depuis le 14 mai 2011, et pour cinq ans, Michel Martelly est le président de tous les Haïtiens, après avoir remporté des élections troublées, organisées par un Conseil électoral provisoire faible, affaibli et dépassé par les enjeux des élections qu'il avait la charge de conduire. 

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Monsieur Martelly a dû faire en 2011, en accéléré, ses classes de politicien pour faire passer un Premier ministre de son choix, puis pour gouverner avec un Parlement qui ne lui est pas acquis.

L'avenir lui appartient s'il arrive à se départir de son cercle d'amis et à ne pas tomber dans le cercle vicieux de chercher à plaire à tout prix à ses nouveaux alliés.

Denis O'Brien

Le Big Boss de Digicel ne parle pas un mot de français, ne s'est jamais essayé à parler créole, et pourtant il est l'homme d'affaires qui interpelle le plus aux Haïtiens. D'abord, depuis l'inauguration de sa compagnie qui a fait toute sa communication dans la langue vernaculaire, avec un souci de vendre ses services aux plus bas prix et en offrant le meilleur service aux clients.
Depuis, le contrat entre la Digicel d'O'Brien et les Haïtiens se renforce avec une succession de gestes qui touche : construction d'écoles, support à perte au football et, en sautant d'autres, la reconstruction de la poche du PDG irlandais du Marché en fer.
O'Brien l'Irlandais et sa compagnie tracent un chemin que tous les Haïtiens rêvent de voir prendre le reste du secteur privé, toutes proportions gardées...

Claire Lydie Parent

La mairesse de Pétion-Ville a été la première à se colleter au problème des sinistrés de sa commune. Au départ, sans appui ni des ONG, ni des amis d'Haïti, ni de l'Exécutif.
Tout le monde attendait sa chute, emportée qu'elle serait par une manifestation des sans-abri. Rien de cela n'a eu lieu.
L'idée de Claire Lydie Parent de payer pour aider les gens à se reloger pour vider les places publiques de sa commune est aujourd'hui le seul modèle consensuel de déguerpissement des sans-abri deux ans après le tremblement de terre du 12 janvier 2010 qui avait provoqué plus d'un million et demi de sinistrés.
Tout le monde, surtout les ONG, avait oublié que les victimes du 12 janvier, en grande majorité, n'étaient pas propriétaires au moment du séisme. Un coup de pouce et ils sont redevenus locataires.

René Préval

Le président sortant a eu le mérite de soigner sa sortie. Certains disent qu'il a bu la coupe du pouvoir jusqu'à la lie. D'autres signalent son courage d'être allé jusqu'au bout de son mandat et d'avoir permis en 2011 la conclusion des élections entamées en 2010. Préval est le premier de nos présidents à avoir accompli deux mandats pleins et non successifs, mais surtout à passer l'écharpe présidentielle à un président qui n'était pas de son camp.
René Préval, à plus d'un titre, restera dans l'histoire comme un président de la République qui a marqué son temps.

Guito Toussaint

Assassiné en 2011, Guito Toussaint aura eu le temps de marquer de son empreinte l'histoire d'une institution bancaire propriété de l'Etat haïtien dont il avait pris la tête sans être un banquier de métier.
De commission de redressement en mandat clair, Guito Toussaint aura prouvé qu'une institution publique peut être rentable et se comporter correctement dans un univers concurrentiel.
Toussaint restera un exemple pour les fonctionnaires et pour les gestionnaires.

Lyonel Trouillot

L'écrivain le mieux installé dans notre paysage- il est écrivain depuis si longtemps- n'est pas le plus populaire de nos gens de plume, mais quel talent, ce Trouillot ! Quel tempérament ! Et quelle palette de compétences ! Il est bon dans nos deux langues, succulent aussi bien comme romancier que comme éditorialiste, cajoleur comme parolier ou poète, acerbe en critique ou en témoin désabusé de son temps et de nous-mêmes, les Haïtiens comme lui.
Avec « La belle amour humaine », Lyonèl Trouillot n'a pas décroché le prix littéraire français qu'il méritait mais a étonné plus d'un avec son écriture renouvelée.
Ah ! s'il voulait bien se faire comprendre du public haïtien ! Mais on ne peut pas lui demander d'avoir tous les talents et d'être dompteur des amours du public.

Wanito

Au début de 2011 son nom ne suscitait aucune réaction. En cette fin d'année, tout le monde connaît ses refrains, entonne des couplets entiers de ses chansons.
Dans les taps-taps, à la radio, comme dans les fêtes, dans un style inimitable et avec des mots simples, le jeune chanteur s'impose en phénomène. Sans faire exprès, il vole la vedette à tout le monde, est la coqueluche des enfants et des parents qui n'ont rien à redire de ses textes.

Fantz Duval
Le Nouvelliste